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 Grèce - mars 2012

 

  Coco – Alors, Tu as vu l’actualité en France ?  Entre les élections, ce qui s’est passé dans une école à Toulouse, les turbulences en Grèce et tout le reste que l’on n’a pas vu ou lu, on est plutôt chanceux de pouvoir s’échapper de cette actualité déprimante, même si celle-ci nous rejoint car en Grèce, c’est aussi la crise.

  José - Oui ! Eh bien ! C’est reparti pour un nouvel  échange de nos réflexions. A notre premier passage en Grèce, nous étions restés sur notre faim, à peine satisfaits de notre visite dans le pays. Il faut dire que cette fois-ci la région d’Evros nous plait beaucoup, la nature est superbe. Comme quoi, retourner dans un pays pour approfondir et se faire une idée plus juste est important.

  Coco - As-tu remarqué que La Grèce est un pays où l’état et la religion ne font qu’un ? 

  José - Je m’interroge d’ailleurs sur le vivre ensemble dans ce pays. La religion la plus représentée est  la religion Orthodoxe. Qu’en est-il des autres religions ? Comment  l’Etat prend ses positions quand dans un même pays il y a autant de cultures diverses issues des échanges historiques  entre Occident et Orient ?
  Je me pose également la question pour les pays musulmans, pays où l’Etat et la religion ne font aussi qu’un. Si nous pourrions nous sentir chez nous tellement nous sommes accueillis à bras ouverts par les familles, comment le vivre ensemble peut s’envisager dans le temps. Dans un village, est-il possible de vivre sans porter le voile, en étant laïque, sans croire en Dieu ?

  Coco - Pour illustrer ce propos, je te rapporte l’échange que j’ai eu avec un prêtre Orthodoxe, croisé dans la rue. Une de ses premières questions a été "De quelle religion êtes-vous ?"
   Déjà, on peut s’interroger sur la justification de sa question. Puis, vu ma réponse et sa réaction, son étonnement, il m'a fait sentir que je ne faisais pas partie de sa communauté. Je n’ai pas pu résister de lui dire : «Nous sommes tous frères».

  José - Et que t’a-t-il répondu ?

  Coco - Rien, il m’a sourit.

  José - Ah Bon ?

  Il est frappant de constater des écarts importants  entre les villes des bords de mer et les villages reculés dans l’arrière pays, dans les montagnes. Notamment dans les villages où les populations sont d’origine Turque, Bulgare … (La région d’Evros est bordée par la frontière bulgare au nord, et la frontière turque à l’est).
  On sent véritablement un écart  de niveau de vie. Pourquoi ? Est-ce culturel ? Est-ce parce que ces populations sont moins bien payées pour un même travail donné ? Est-ce que l’Etat se désintéresse de ces populations ?
  Nous  ressentons toute la difficulté de se faire une opinion. Ici, les gens sont charmants, polis et courtois avec nous. Pour la rencontre ? Nous  avons pourtant eu des occasions, et la plupart du temps, nous n ‘avons pas senti cette envie d’aller plus loin dans la relation. Est-ce de la méfiance ? La mentalité européenne est présente avec ses règles de politesse  mais il y a toujours une certaine distance qui n’existe pas avec la population orientale.

  Coco -  Sauf, rappelle-toi, lors d’un tournage sur la cuisson du pain, l’accueil que nous a réservé Panagiota, jeune femme qui tient un restaurant à Kornofolia, a été sensationnel. Nous avons ressenti tout le plaisir qu’elle avait à nous recevoir et nous donner de multiples informations et conseils sur sa région. 

  José – Ha oui. Et puis aussi  cette rencontre avec les cinq militaires grecs en permission sur le chemin menant à l’observatoire du Parc National Dadia. J’ai remarqué qu’ils souhaitaient avoir un échange avec nous.

  Coco - Oui, tu as vu, très rapidement, l’un deux nous a apporté deux assiettes pour partager leur repas. Au départ, on lui dit, non, non. Il insiste tellement que nous finissons par déguster la traditionnelle salade grecque offerte : tomates, concombres, oignons, poivrons, olives, et la fêta bien sûr, délicieuse, accompagnée de pain et de bière.

  José - Comme quoi, notre éducation !
  Cette rencontre a été intéressante car nous avons pu échanger et savoir comment cela se passe pour eux avec la crise en Grèce. Et là, ils nous confirment qu’elle est bien là. Ce n’est pas qu’à Athènes. Partout dans toutes les grandes villes, il y a des mouvements dans la rue pour manifester.

  Coco - Oui, ils nous ont bien expliqué l’origine de ce mécontentement. Tous les salaires ont été diminués d’un coup. Aujourd’hui, le salaire de base dans le privé est de 500€ et de 700 à 800€ dans le public. Avant la crise, il y a 2 ans, le salaire était de 800€ dans le privé (ce qui fait une baisse de 37%) et de 1 100 à 1 200€ dans le public. Ces baisses de revenus, la suppression des aides, l’augmentation des impositions, servent à renflouer les caisses de l’Etat. Dans le même temps, les prix à  la consommation ont explosé (même niveau qu’en France) ainsi que les charges du ménage.

  José - Et ce qu’ils ont dit quand on leur a demandé si  c’est bien  vrai ce que l’on entend : «Les grecs ne paient aucune taxe, c’est pourquoi le pays est en faillite».  Ils nous ont répondu : «C’est à la fois, vrai et faux. En fait, les plus riches ne payaient pas de taxes car ils avaient le pouvoir de dire non, les plus pauvres n’en payaient pas parce qu’ils ne pouvaient pas, et les classes moyennes, certains payaient, d’autres pas, selon. Et puis, tout l’argent que l’Etat a reçu de l’Europe n’a pas servi au pays, mais a permis aux élites de s’enrichir. Et aujourd’hui encore, c’est la même chose».

  Coco - Et leur réaction quand je leur ai demandé comment cela se traduit dans le travail, dans les familles… Ils ont tous autour d’eux quelqu’un qui a perdu son emploi.  Ils nous font constater que chez eux, ils n’ont pas Citroën, Renault… Ils ont les olives, les chèvres, le soleil… et une saison touristique de 3 mois seulement. 

  José - J’ai relevé leur réponse à ma question sur la solidarité : Est-ce qu’elle fonctionne chez vous ? Tu as vu, ils ont répondu que non, pas vraiment ! Et l’un d’eux a même rajouté «Vous savez, ici, le monde du travail et la politique fonctionnent ensemble. Mon père me dit, pour avoir un travail, il faut voter pour celui-ci. Si tu veux un boulot, c’est comme çà».

  Coco - Oui, il y en a même un qui a rajouté : "Pour les jeunes de notre génération, c’est difficile. Je ne sais pas si çà va durer comme çà longtemps. Peut-être qu’un jour çà va  exploser".


Les cinq jeunes           @ Colette Saudubois

   Merci à Dimitri (2), Anesti, Michaël et Constantin, d’avoir partagé avec nous leurs états d’âme. Actuellement, appelés au service militaire obligatoire.

  José - Tu vois, le voyage nous permet d’entendre en direct la parole des populations et c’est important. Certes, c’est la parole que de quelques personnes, mais dans nos déplacements nous ressentons plus fortement, car disponibles et à l’écoute, tout le poids de cette période charnière, des turbulences politiques et économiques que subit le peuple.

  Coco - On peut peut-être passer à des sujets moins sérieux, plus légers ?
  Nous avons passé deux bonnes semaines en compagnie de Morgane et David. Deux jeunes français, partis depuis un an et demie de France avec l’âne Rassoudok, le mulet Cortex et le chien Pity. Sur la route, ils ont acheté une toute petite roulotte pour porter leurs affaires et soulager ainsi leurs animaux. Ils souhaitent rejoindre l’Inde. Quand ? Ils ne le savent pas, ils ont le temps avec eux. Tu as vu c’est un départ, semble-t-il, sans retour !

  José - Oui, ils ont décidé de quitter la France, ils ne se sentent plus bien dans ce pays tel qu’il est aujourd’hui.

  Coco -  Remarque, on peut le comprendre mais malheureusement, il n’y a pas que la France comme çà. En tout cas, j’ai beaucoup apprécié nos échanges de point de vue, sans jugement. Et ils nous montrent d’autres possibles, et çà c’est bien, même si ce n’est pas pour tout le monde.

  José - Je ne sais pas aujourd’hui où ils sont rendus ? Depuis que nos routes se sont séparées le 22 mars, j’espère qu’ils ont bien passé la frontière turque ?

  Coco - On ira voir sur leur site pour les dernières nouvelles. (www.rassoutex.centerblog.net).


               Morgae et David  Bonne route
               @ Colette Saudubois

  Vidéo en cours.


  José - On peut parler également du Parc National Dadia (Voir aussi les rubriques  Parcs naturels  et  Faune et flore  pour plus de détails). C’est un lieu qui ne nous laisse pas indifférents. La qualité des paysages, la variété des espèces animales, peu d‘urbanisation, une nature gardée intacte comblent nos attentes.

 Pine forest
 Forêt de Dadia                                  @ José Saudubois

  Coco - Oui, et il se passe plein de choses autour de ce parc, avec notamment le rythme du métier de chevrier partant tous les jours avec son troupeau, la dure vie de labeur des bûcherons. C’était bien d’avoir pu les filmer. Ces derniers tronçonnent actuellement 75 000 ha de pinède partis en fumée l’année dernière. Cela devrait leur prendre 4 mois par an, sur deux années. Je les trouve bien courageux, mais, la paie est bonne (environ 80 €/jour pour 4-5 heures de travail).    
  Alors !


              Transport du bois à dos de mulet 

              La pause avant le départ avec le troupeau  Sur le chemin des pâturages
              @ Colette Saudubois

  José -  En conclusion, on peut dire que l’on a passé un mois de mars riche en découvertes, on ne s’est pas ennuyés (comme d’habitude). Dans 2 semaines, ce sera un retour vers la Turquie, et on a déjà repéré plusieurs sujets de reportages. On va préparer çà Coco ?


                           Vous pouvez également lire le nouveau billet déposé  dans le blog.