Turquie - Chypre - décembre 2011


  Silifke, delta de Göksu, Turquie 2011


  Notre  voyage est dans l’intermédiaire, quelques visites de monuments, peu de rencontres, beaucoup de marches dans la nature.
  Aussi, avons-nous décidé pour cette page de décembre de vous parler de nos lectures, des films que nous avons aimés, de nos sentiments sur la vie, sur notre vie.
  Nous allons raconter une histoire, constituée d‘extraits de livres inscrits sur nos carnets.
  Des auteurs que nous avons aimés, des pensées sur le voyage et d’autres voyages, des images.
  Cette histoire n’est pas triste, mais pas gaie non plus. Elle est comme une glissade, ce mouvement léger au ras du sol, ou servant d’élan à certains temps sautés !

  Cette histoire commence sur les bords de la mer à Silifke dans le Delta de Göksu, en Turquie. Nous prenons le chemin qui longe la rive, parmi la végétation et les chants des oiseaux. Cette nature si propice pour se rapprocher de l’essentiel.  Essayer de comprendre le sens de la vie. De nos vies !


Silifke, Delta de Göksu - Turquie 2011                                                  @ José Saudubois

  "Partir c’est se préparer à revenir différent, à découvrir et admettre que notre monde n’est pas ce que vous pensiez. Admettre et vérifier que le centre du monde n’existe pas, et que s’il existait, ce ne serait pas vous, ni plus ni moins qu’un autre."
  -Hervé Hamon-

  "On croit que l’on va faire un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait ou vous défait."
  -Nicolas Bouvier-

  "La liberté est entravée par ce que l’on possède."

  "Ce que l’on fait avec le temps, le temps le respecte."


  L’ex-pasteur
  .../… Peut-être qu’il n’y a pas de péché, pas de vertu. Il y a seulement ce que font les gens. Il y a des choses qui sont bien, d’autres pas…/...

  Un voisin
  .../… J’ai deux gosses à la maison, et ma femme et ma belle-mère. Il faut qu’ils bouffent d’abord et avant tout. Je pense à ma famille. Ce qui arrive aux autres, çà ne regarde qu’eux…/...
  .../… Il se passerait  pas deux jours avant que quelqu’un d’autre prenne ma place…/...

  La mère
  .../… Ils t’ont fait du mal mon gars ? Ils t’ont fait du mal à t’en rendre fou de rage. Des fois, ils vous font des choses, comme cela. Ils vous frappent à vous rendre malade, ils vous frappent et on devient mauvais, ils vous frappent encore et on devient de plus en plus mauvais, jusqu’à ce qu’on soit plus un homme mais un chien enragé…/...

  Le fils
  .../…Tu ne regardes pas en arrière, Maman, un dernier coup d’œil au pays, non ? Mais ça ne te ressemble pas, Maman …/…

  La mère
  .../… J’ai jamais eue ma maison écrasée, j’ai  jamais eue ma famille jetée sur la route, j’ai  jamais perdu tout ce que j’avais au monde, AVANT …/...



                                                  @ José Saudubois


  L’ex-pasteur
  .../… Il y a quelque chose qui se passe là-bas et je voudrais bien apprendre à connaître ce que c’est …/...
  .../… on s’intéresse bien plus souvent aux morts qu’aux vivants…/...


                                                                         @ José Saudubois


  .../… Il faut que tu apprennes comme j’apprends. Je ne sais pas encore bien moi-même, mais j’essaie de comprendre les choses. C’est pourquoi je ne pourrais jamais redevenir pasteur. Un pasteur doit savoir, moi,  je ne sais pas…/...

  La mère
  .../… Oh, t’as fait ce que tu avais à faire. Je ne peux pas y trouver à redire …/...
  .../… Il y a bien des choses que je ne comprends pas. Il y a un temps où nous avions notre terre, quelque chose nous tenait ensemble à ce moment. Les vieux mouraient, les jeunes les remplaçaient et on ne faisait toujours qu’un, c’était la famille, un entier, un tout. Mais maintenant il n’y a plus d’entier, cela craque de partout …/...


                                                  @ Colette Saudubois

  Le fils
  .../… Il voyait clair (en parlant du pasteur). Il était comme une lampe, il m’éclairait aussi, comme une lampe.
  Et je me suis souvenu de tout. Peut-être que je peux faire quelque chose. Peut-être que je pourrais trouver une réponse. Peut-être que je trouverais ce qui ne va pas, et voir ce que je peux faire pour çà.
  J’ai pas tiré cela au clair, je ne sais pas assez.
  Un homme n’a pas une âme à lui tout seul mais rien qu’un petit morceau d’une grande âme. La grande âme commune qui appartient à tout le monde.
  Alors ! çà ne fait rien, je serais partout dans l’ombre, je serais partout où tu seras, partout où il y aura une bagarre pour que les gens puissent bouffer, je serais là, partout où il y aura un flic qui frappera un gars, je serais là, je serais là où les types gueulent quand  ils deviennent enragés, et je serais là où les gosses rient quand ils ont faim et qu’ils savent que la soupe est prête et quand les gens mangerons les choses qu’ils font pousser et vivront dans les maisons qu’ils construisent, je serais là aussi.
  Je ne comprends pas tout çà, moi non plus, Maman, mais c’est une chose à laquelle j’ai réfléchi …/...
  Extrait "Les raisins de la colère." - Steinbeck-

  .../… Comment les choses souhaitent-elles être racontées. Où est le vrai récit, où est le faux récit…/...
  .../… Une des faiblesses de notre système, de la civilisation, c’est un souci de l’efficacité, la crainte de l’échec  presque panique.
  L’échec  est  formateur. Prendre des risques rend la vie plus longue …/...
  .../… Les valeurs du travail ont remplacées les valeurs de présence aux choses. Elles sont essentielles, ces choses, si on veut arriver en fin de parcours en ayant pris bonne connaissance de ce que nos cinq sens nous présentent, et très souvent par souci de faire, on oublie d’être, et être, c’est simplement être attentif aux autres, aux feuilles, au vent, aux cheveux des femmes, aux regards, aux bruits …/...
  -Nicolas Bouvier-

  Ecoutez voir





  "Les documents historiques ne sont jamais plus palpitants que lorsqu’ils s’incarnent en visages, fragments de vies et itinéraires singuliers.
  Epopées romanesques, misérables, déchirantes, porteuses des espoirs et des désillusions."

 
  "Les victimes de la pensée différente."

  "Ne sommes-nous sensibles qu’aux apparences ?"

  .../... Les grands prêtres et les gouverneurs dirent alors :
  "Oh, notre seigneur et notre maître, nous ne sommes pas coupables, nous avons construit comme nos pères l’avaient fait avant nous. Regarde ton image comme nous l’avons maintenue souveraine et seule, à travers tout notre pays. Notre tâche est difficile : avec l’épée et la flamme, nous avons défendu ton sol, et l’avons laissé inchangé, et de nos houlettes acérées, nous avons conservés, comme tu nous l’avais confié, ton troupeau de moutons."
  Alors le Christ fit venir un ouvrier, un homme à l’air stupide, hagard et abruti, et une orpheline dont les doigts décharnés avaient du mal à repousser la faute et  le péché.
  Puis il les fit asseoir au milieu d’eux, et comme ils rentraient les parements de leurs beaux atours, par crainte de se salir :
  "Voilà, leur dit-il, l’image que vous avez faite de moi !" .../...
  -James Russel Lowel-

  On nous dit tout
  On nous cache rien
  On ne sait rien

  Devise antique :  "Que sais-je ?"

  "Je ne savais pas ce que je voulais faire, mais je savais ce que je ne voulais pas faire." 
  - Ella Maillard-

  "L’utopie, ce n’est pas quelque chose d’irréalisable, c’est quelque chose qui n’a pas encore été réalisée."
  - Théodore Monod -

  "Qu’importe ma vie ! Je veux simplement quelle reste fidèle jusqu’au bout à l’enfant que je fus. Oui, ce que j’ai d’honneur et le peu de courage, je le tiens de l’être aujourd’hui pour moi mystérieux qui trottait sous la pluie de septembre, à travers les pâturages ruisselants d’eau, le cœur plein de la rentrée prochaine, des préaux funèbres …/…  De l’enfant que je fus et qui est  à présent pour moi comme un aïeul." 
  -Bernanos-


                                                  @ José Saudubois


  "Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie."
  -Albert Londres-

  "Etre capable de traitrise, abuser de son pouvoir de journaliste, prendre le goût du risque, poser des barricades autour de soi. Edifier sa carrière, en nouant des amitiés provisoires, pour qu’elles n’entament pas  cette carrière."

  "Beaucoup de gens se plaignent de ce que la télévision soit superficielle. Mais c’est la nature de ce support.la télévision ne donne pas du tout de l’information.  
  L’information est active, elle engage. La télévision est passive. L’information est désintéressée et objective. La télévision est émotionnelle.
  C’est du divertissement. Quoi qu’il dise, quoi qu’il fasse, l’animateur de télévision ne s’intéresse pas à vous, à votre compagnie, à votre métier. Il est payé pour exercer son seul talent ! Provoquer les gens, les pousser à des explosions émotionnelles, à perdre le contrôle d’eux-mêmes, à dire quelque chose de scandaleux. Il n’a pas vraiment envie de s’informer. Il veut juste un moment MEDIATIQUE".


                                                  @ José Saudubois


  "On n’a pas le temps de se fabriquer une pensée… La télé fabrique de l’oubli. Le cinéma fabrique des souvenirs."
  -Jean-Luc Godard-

  "On a tendance à se concentrer sur l’image qu’on en oublie la nature du sujet. Les gens deviennent des objets.
  On essaie de couvrir un sujet, ou d’obtenir une belle image. Ce qui amène à oublier que les gens souffrent, qu’ils meurent.
  On ne voit plus que l’image. Il faut être attentif aux autres."

  "Dire en photos toute la complexité du monde ?"

  "Ce qui compte, ce n’est pas ce que l’on voit dans le viseur, c’est ce que l’on ne voit pas."

  …/… De toute façon, on ne peut pas militer avec des images,  ni même faire respecter ses convictions.
  On peut être sûr que l’image remise à la presse sera utilisée n’importe comment, et souvent pour illustrer le contraire de ce qu’elle veut dire pour le photographe. Il en est de même pour les propos. Le journaliste n’écrit que ce qu’il veut entendre …/…

  …/… Evitez dans faire trop. Cela devient suspect. La photographie sociale n’est pas une dénonciation mais une affirmation. Voilà ce que nous sommes, ce qu’il y a autour de vous. A vous de juger…/…

  …/… Je ne veux pas être soumis aux exigences commerciales des agences de presse…/…

  …/… Pourquoi, moi, je fais une photographie ? …/…

  .../... Personne ne s’intéresse à la photo comme je l’entends, une aventure ! …/…

  …/… La confusion générale des valeurs, où est le faux, où est le vrai. On a perdu le sens le plus élémentaire des valeurs. La photographie doit répondre à une nécessité. On s’aperçoit rapidement que rien n’est aussi simple qu’on le croyait au départ …/…
  -François Hers, photographe - Extraits  "Récits "



  "Car les monstres ne sont pas toujours ceux qui en ont l’air. Ce n’est pas l’aspect physique qui est insoutenable, mais ce que les autres font endurer."
  .../... Je ne suis pas un animal, je suis un être humain .../...
   Extrait du film "Elephant man" -David Lynch-


  "Pourquoi êtes-vous riche ?"

  "Je suis nommé, j’ai un temps pour m’enrichir, avant que d’autres réagissent. Si quelqu’un s’occupe de mes affaires, je saurais vite m’en occuper !
  J’en ferais vite un être décadent ou je m’en débarrasserais !"


 "Les hommes de cette terre corrompue sont toujours enclins à favoriser les intérêts des leurs et sont incapables de regarder le monde entier comme leur patrie spirituelle."


  …/… Il ne peut y avoir d’innocence dans ce monde, puisque l’homme y vit …/…  Cette vie est pleine d’iniquités. La vie est toujours injuste. Nous devons affronter le monde tel qu’il est et non tel qu’il devrait être. C’est la vie. Il y a toujours un pauvre bougre pour vous ordonner ce que vous devez faire.
  Pour vivre votre vie à votre place …/…

  "Etrange système où l’on enlève la dignité à "l’être", pour ensuite s’apitoyer sur son sort et lui apporter aide et soutien."

  "Pourquoi ne peut-on pas se donner, pourquoi ne peut-on pas apprendre à aimer."
   Extrait -L’année de tous les dangers -


   Suis-je donc fou ?
   .../... Cette phrase qui résonne encore dans ma tête, je me souviens du malaise qu’elle fit lever en moi. Pour la première fois, je mettais le pied dans un univers où tout est déterminé par l’extérieur. Ce que vous éprouvez et pensez, le sentiment que vous avez de votre liberté intérieure, de votre responsabilité morale, rien de cela n’existe vraiment. Vous n’êtes que ce que vous paraissez, à travers les critères sociologiques, policiers, médicaux que l’on projette sur vous. Et contre ces puissances dont vous devenez le jouet, il n’existe aucun recours : ce que vous dites n’est pas entendu, à moins qu’il ne soit retenu contre vous, comme une preuve supplémentaire du jugement où l’on vous a enfermé .../...

  "Un homme, contraint par la pression d’un groupe, à faire quelque chose qu’il ne croit pas, préférera
 se mentir à lui-même plutôt que d’affirmer seul, face aux autres, sa vérité."
  -Léon Festinger-  "Phénomène, rupture - Dissonance cognitive"

  "La mort est occultée car elle ne se marie pas avec l’économie. Notre système est basé sur le rapport au travail et l’accumulation de l’avoir. Nous oublions que nous sommes mortels. Parler de la mort relativise notre passage sur terre. La mort est l’ennemie de l’économie."


Le chien                                                  @ José Saudubois


  "Quand l’artiste atténue la grimace de la douleur, l’avachissement de la vieillesse, la hideur de la perversité, quand il arrange la nature, quand il la voile, la déguise, la tempère pour plaire au public ignorant, il crée de la laideur, parce qu’il a peur de la vérité."
  -Rodin-


  "Ce que je veux, c’est  plonger dans les profondeurs. Montrer des moments de «l’être».
  Le récit lisse n’est pas une méthode de narration juste. Cela ne se passe pas ainsi dans la pensée.
  Les images et les idées se chevauchent constamment et les romans contemporains devraient transmettre
cette impression de confusion mentale au lieu de tout remettre soigneusement en ordre."
  -Virginia Woolf -


   /... La représentation artistique  de la seule beauté (dans son acceptation matérielle) est un grossier enfantillage : c’est le stade infantile de l’art, écrit-il à son ami Stassov. L’étude des traits les plus fins de la nature humaine, comme celle des masses, l’exploration obstinée et la conquête de territoires peu connus, voilà la mission naturelle de l’artiste.../
  -Moussorgski, compositeur russe  à travers ses lettres-

  "Ressentir une visite imprévue comme un dérangement, c’est un signe certain de faiblesse, une fuite devant l’imprévu.
  On se terre dans une vie dite "privée", faute d’avoir les forces nécessaires pour affronter le monde. On fuit le miracle et l’on se réfugie dans une attitude d’autolimitation. C’est une retraite. Car enfin l’existence, c’est avant tout être avec les choses, c’est un dialogue. On n’a pas le droit de s’y dérober.
  Vous pouvez toujours venir me voir quand vous voulez."
   -Franz Kafka-


  "Et dire que la mémoire est la matière de mon présent, et ce qui en reste, la chose que je suis."
   -Hector Biancotti- Extrait "Ce que la nuit raconte au jour."


  "Heureux qui oublie ce qui ne peut plus changer."

  "Il est écrit que je dois faire moi-même mon malheur. Jadis, c’étaient les seuls accidents de la vie  qui m’affligeaient. Maintenant,  je porte un juge terrible en moi qui ne me laisse nul repos."
   -Alexandra David-Neal-

  "Mû par le désir de vérité et de soupçon, car la vérité n’est pas ce qu’elle paraît dans le moment présent."

   "Regarder les choses par le bon bout de ma raison."
   -Gaston Leroux, dans ses écrits sur Rouletabille-


  …/… Donc j’étais tout à l’heure au jardin public. La racine du marronnier s’enfonçait dans la terre, juste au dessous de mon banc. Je ne me rappelais plus que c’était une racine. Les mots s’étaient évanouis et, avec eux, la signification des choses, leurs modes d’emploi, les faibles repères que les hommes ont tracés à leur surface. J’étais assis, un peu voûté, la tête basse, seul en face de cette masse noire et noueuse entièrement brute et qui me faisait peur. Et puis j’ai eu cette illumination. Cà m’a coupé le souffle. Jamais avant ces derniers jours, je n’avais pressenti ce que voulais dire "exister" …/…
  -Jean-Paul Sartre- Extrait "La nausée."


  …/… Ces matins, ces soirs, ces routes. Les routes changeantes, mystérieuses. Ces routes pleines du pas des hommes.
 Ai-je donc tant aimé les routes, nos routes, les routes du monde ? …/…

  -Bernanos-


Sur les routes                                                   @ José Saudubois

   Photos en cours.




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